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L’orthophoniste est un spécialiste des troubles du langage et des apprentissages. Les patients le consultent à tout âge de la vie pour rééduquer des difficultés locutoires et développer des stratégies compensatoires en cas de troubles cognitifs. Chez l’enfant, plusieurs motifs de consultation conduisent chez l’orthophoniste. Quels signes doivent alerter et comment reconnaître les différents troubles des apprentissages ? Merlin vous aide à mieux comprendre la prise en charge orthophonique pour accompagner efficacement votre enfant dans ses bilans et soins.
Troubles du langage chez l’enfant : comment les identifier ?
Il faut attendre l’âge de 2/3 ans pour se poser des questions sur le niveau d’acquisition de langage de son enfant. Chaque enfant se développe à son propre rythme. Il peut faire des progrès très rapides lorsque le bon moment est venu pour lui. Quelles sont les étapes clés d’acquisition du langage chez l’enfant ?
Les étapes clés du développement du langage chez l’enfant
L’acquisition du langage chez l’enfant suit un développement progressif qui commence dès la naissance. Les premiers mois sont marqués par une phase de perception et d’exploration sonore. Le bébé réagit aux voix, reconnaît l’intonation et produit des vocalisations spontanées comme des gazouillis. Autour de six mois, il commence à babiller en répétant des syllabes simples telles que « ba-ba » ou « da-da », posant ainsi les bases de la parole.
Vers douze mois, l’enfant prononce généralement ses premiers mots significatifs et comprend des consignes simples. Entre un an et deux ans, son vocabulaire s’enrichit rapidement. Il commence à associer deux mots pour exprimer une idée, comme « veux doudou ». À partir de trois ans, il forme des phrases plus élaborées avec une structure grammaticale de plus en plus correcte. Dans le même temps, il affine sa prononciation. Ainsi, il est capable de reproduire une comptine ou une chanson apprise. Le catalogue Merlin comprend un large choix de comptines pour la maternelle, pour s’amuser à la récré et pour apprendre l’alphabet).
Entre quatre et cinq ans, l’enfant maîtrise la plupart des sons de sa langue maternelle et construit des phrases complexes. Son langage devient plus fluide et il peut raconter une histoire, poser des questions et exprimer des idées abstraites. C’est aussi la période où il comprend mieux les règles sociales de la communication, comme attendre son tour pour parler. Enfin, l’acquisition du langage continue de se perfectionner tout au long de l’enfance, notamment à travers l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
Retard ou trouble du langage, quelle différence ?
Le retard de langage peut avoir plusieurs causes, souvent temporaires. Alors qu’un trouble durable traduit une difficulté plus profonde et persistante dans l’acquisition du langage.
Un retard de parole peut être lié à un environnement pauvre en stimulations verbales. On retrouve dans cette catégorie les cas de surexposition aux écrans, dont les scientifiques ont pointé les effets délétères sur l’acquisition du langage. Lorsque l’enfant est pris en charge en orthophonie, il récupère et développe rapidement ses facultés de communication. Par ailleurs, l’enfant peut être gêné dans ses apprentissages langagiers quand il souffre de troubles sensoriels transitoires. Il peut s’agir par exemple d’une otite séreuse chronique ou encore de bouchons d’oreille. Toute pathologie qui affecte l’audition est susceptible de retarder l’acquisition du langage. Encore une fois, lorsque l’enfant est traité, il rattrape son retard très rapidement. Il reste néanmoins important de le rassurer et de l’accompagner pour qu’il ne perde pas confiance en lui et en ses capacités.
Autre facteur qui peut perturber l’acquisition du langage : un bilinguisme mal accompagné. En effet, lorsque l’enfant est exposé à deux langues différentes, il peut avoir du mal à construire les bases langagières pour s’exprimer correctement dans l’une ou l’autre langue. Si l’enfant est en difficulté, il est préférable qu’il se concentre sur une seule langue. Il la pratiquera au quotidien, afin d’être parfaitement à l’aise. L’apprentissage de la seconde langue viendra dans un second temps. Il sera d’autant plus facile que la première ne pose plus de problème.
En dehors de ces cas de figures, si l’enfant parle peu ou plus tard que les autres, il peut avoir besoin d’un accompagnement spécifique. Une consultation chez l’orthophoniste permettra de distinguer un simple retard d’un trouble qui nécessite une rééducation adaptée.
Les principaux troubles du langage
On parle de troubles du langage lorsque les difficultés persistent au-delà de 3 ou 5 ans, en fonction des symptômes. Et ce, malgré les stimulations des parents et des enseignants.
Voici les principaux troubles qui peuvent concerner l’enfant :
- Difficultés articulatoires et motricité bucco-faciale. Elles affectent la prononciation des sons en raison d’un mauvais placement de la langue, d’une faible tonicité musculaire ou de troubles oro-moteurs impactant la parole. Dans cette catégorie on trouvera par exemple la dyslalie, qui comprend notamment les fameux zozotement (sigmatisme interdental), zézaiement (« CH » et « JJJ » sont remplacés par « SSS » et « ZZZ ») et schlintement (sigmatisme latéral »).
- Dysphasie. Il s’agit d’un trouble neurodéveloppemental affectant durablement l’acquisition et l’organisation du langage. D’origine cérébrale, la dysphasie résulte d’un dysfonctionnement des zones du cerveau impliquées dans le traitement du langage. Elle n’a pas de lien avec un déficit intellectuel ou sensoriel.
- Troubles liés au retard de communication. Ils résultent de dysfonctionnements neurodéveloppementaux perturbant les interactions sociales, l’expression et la compréhension. Ils sont souvent associés au TSA (trouble du spectre autistique) et trouvent leur origine dans des atypies cérébrales impactant le langage verbal et non verbal.
- Troubles du langage d’origine cognitive liés à des déficits intellectuels, neurologiques ou neurodéveloppementaux affectant la compréhension et l’expression orale.
- Troubles du langage d’origine environnementale. Ils résultent d’un manque de stimulation linguistique, d’une exposition limitée au langage ou de facteurs psycho-affectifs (négligence, stress, bilinguisme mal accompagné).
- Troubles de l’attention ayant un impact sur le langage. Le TDAH peut affecter la communication orale, la structuration du discours et la compréhension. Il peut être associé à des difficultés d’articulation, d’organisation du langage et d’interaction sociale.
Les difficultés de langage qui doivent vous alerter
Le site Ameli.fr recense pour chaque âge les signes qui doivent conduire à consulter pour son enfant.
Prenez rendez-vous avec votre pédiatre si vous avez des doutes alors qu’à :
- 6 mois, votre enfant ne réagit pas au bruit (l’assurance maladie recommande un bilan auditif).
- 18 mois, ne parle pas, « ne babille pas, ne pointe pas du doigt ».
- Entre 2 et 3 ans, il ne comprend pas des paroles simples. Il s’exprime avec moins « de 50 mots de vocabulaire. Et il n’utilise qu’un nombre limité de consonnes » et sans faire de phrases (deux mots minimum).
- À 3 ans, ses phrases ne respectent pas la structure sujet + verbe + complément. « Il rencontre des difficultés à trouver le bon mot pour exprimer ses idées et n’est compris que par son entourage ».
- À partir de 4 ans, son vocabulaire demeure limité et ses phrases sont courtes ou mal structurées. Il a du mal à raconter des événements simples, transforme les mots et répète des sons. De ce fait, l’enfant est difficilement intelligible, y compris pour son entourage.
- À partir de de 5 ans, l’enfant « n’organise pas correctement sa parole et son langage. Il a des difficultés pour comprendre. »
- En fin de CP, « l’enfant a des difficultés d’apprentissage de la lecture. »
Le site de l’assurance maladie évoque également le cas de l’enfant qui « bégaie, zozote, prononce mal les mots. Ou alors à qui, à 5 ans, un son est toujours manquant et/ou remplacé par un autre. » Il signale aussi les cas où le langage ne progresse plus ou régresse, quel que soit l’âge. Tous ces symptômes doivent conduire à consulter un spécialiste, car ces difficultés peuvent gêner l’apprentissage de la lecture.
Le rôle de l’orthophoniste : quand et pourquoi consulter ?
L’orthophoniste joue un rôle fondamental dans l’accompagnement des enfants présentant des troubles du langage et de la communication. Mais à quel moment faut-il s’inquiéter et consulter un spécialiste ?
Un bilan orthophonique est recommandé dès que l’enfant montre des difficultés persistantes à s’exprimer, comprendre ou articuler et que cela impacte sa communication au quotidien. Plus la prise en charge est précoce, plus il est possible de limiter les répercussions sur les apprentissages scolaires, notamment en lecture et en écriture. Demandez d’abord à votre médecin généraliste ou pédiatre une ordonnance pour faire pratiquer un bilan. En fonction des résultats, c’est l’orthophoniste qui décidera du nombre de séances et des modalités de prise en charge.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que le champ d’intervention de l’orthophoniste ne se limite pas à la parole et à la prononciation de l’enfant. Ce professionnel de santé aide aussi l’enfant à acquérir des méthodes de travail, à organiser sa pensée. Il guide l’enfant pour qu’il apprenne à structurer son discours. Il met en place des exercices pour améliorer l’attention, notamment en cas de TDAH ou de troubles exécutifs. Son intervention peut également concerner la gestion des émotions. En effet, en aidant à surmonter la frustration et le stress liés aux difficultés de langage, il favorise la réussite de l’enfant.
L’orthophoniste élabore un accompagnement sur mesure pour que chaque enfant progresse selon ses capacités. De cette façon, l’enfant renforce son estime de soi et gagne en autonomie. Cela favorise sa réussite scolaire et son épanouissement social.
Comment se déroule une consultation en orthophonie ?
Avant de mettre en place des séances, l’orthophoniste reçoit les parents et l’enfant dans son cabinet. Puis il réalise des tests pendant environ une heure, hors présence parentale. Il est important que l’enfant soit concentré et ne se préoccupe pas de l’opinion de ses parents. Ces derniers pourraient être tentés d’évaluer eux-mêmes leur enfant en fonction des réponses qu’il donne au spécialiste.
L’entretien initial avec les parents
La première séance commence par un échange avec les parents. L’orthophoniste recueille des informations sur le développement de l’enfant, ses antécédents médicaux, son environnement familial et scolaire. Les parents décrivent les difficultés observées (retard de langage, troubles de la prononciation, problèmes de compréhension ou d’attention).
Le bilan orthophonique : évaluation des compétences
L’orthophoniste réalise un bilan orthophonique complet qui permet d’analyser plusieurs aspects du langage et de la communication :
- Expression orale et compréhension : vocabulaire, construction des phrases, articulation, fluidité du discours.
- Motricité bucco-faciale et prononciation : observation des mouvements de la langue et des muscles impliqués dans la parole.
- Compétences liées aux apprentissages : mémoire, attention, organisation du discours, compréhension écrite et orale si l’enfant est en âge scolaire.
Les tests sont adaptés à l’âge de l’enfant et prennent souvent la forme de jeux ou d’exercices ludiques, pour mettre l’enfant en confiance et observer ses compétences dans un contexte détendu.
Restitution et organisation de la prise en charge
À la fin du bilan, l’orthophoniste explique aux parents les résultats et propose un plan de suivi si nécessaire. Cela peut inclure des séances régulières de rééducation pour améliorer l’articulation, la structuration du langage ou la gestion des troubles associés (TDAH, dyslexie, dysphasie…). L’orthophoniste peut également demander des évaluations complémentaires chez le dentiste, l’ORL et l’ophtalmologue, notamment s’il a des doutes sur l’audition ou la vue de son jeune patient. Il faudra dans ce cas repasser par un médecin pour obtenir une ordonnance de bilan ou prendre directement rendez-vous chez un spécialiste.
Les séances de rééducation orthophonique
L’orthophoniste préconise généralement une séance de rééducation par semaine. Rarement plus pour ne pas fatiguer ou braquer l’enfant et rarement moins pour que les séances soient efficaces. Elles durent entre 20 minutes pour les plus jeunes (4/6 ans) et 30 minutes pour les plus âgés (6/10 ans).
Voici quelques exemples de séances adaptées aux besoins spécifiques de l’enfant :
- Exercices de prononciation et de motricité bucco-faciale, pour améliorer l’articulation et la coordination des mouvements de la bouche. À l’aide d’un guide-langue en bois, l’enfant s’exerce par exemple à prononcer les mots d’une liste.
- Jeux et activités ludiques, pour enrichir le vocabulaire et travailler la structuration des phrases (memory, jeu du pendu, devinettes…)
- Stratégies pour améliorer l’attention et l’organisation mentale, notamment en cas de troubles associés comme le TDAH.
- Accompagnement émotionnel, pour aider l’enfant à mieux gérer la frustration liée à ses difficultés langagières.
L’implication des parents est essentielle car bien souvent les exercices sont à refaire à la maison pour renforcer le travail réalisé en séance.
Troubles du langage et apprentissage scolaire : quelles conséquences ?
À mesure qu’il grandit, l’enfant qui présente un trouble du langage va être de plus en plus gêné dans ses apprentissages scolaires. Ainsi, aux alentours de 5/6 ans lorsqu’il commence à prendre conscience de la correspondance graphophonétique de la langue, il peut avoir du mal à décoder et encoder correctement. Ces difficultés peuvent être le signe d’un trouble spécifique des apprentissages, comme la dyslexie. Toutefois toutes les dyslexies ne sont pas dues à un trouble du langage. Seul un bilan orthophonique posera un diagnostic complet pour déterminer l’origine des troubles et leurs répercussions sur la lecture et l’écriture.
De fait, lorsqu’il y a un trouble du langage, l’apprentissage des fondamentaux à l’école est fortement perturbé. En premier lieu, l’enfant éprouve des difficultés globales à comprendre les consignes écrites et orales des différentes matières. C’est pourquoi au moindre doute avant l’entrée à l’école élémentaire, il vaut mieux consulter un orthophoniste. Une prise en charge précoce par ce spécialiste du langage permet de soutenir et d’accompagner l’enfant vers la réussite.
L’orthophoniste adapte ses méthodes à chaque enfant pour l’aider à structurer ses phrases, organiser sa pensée et trouver des stratégies adaptées à ses besoins. En plus des exercices d’entraînement à visée rééducative, l’orthophoniste montre à l’enfant comment organiser son travail (méthodes, prise de notes, organisation des idées avant un écrit, mémoire visuelle et moyens mnémotechniques). Afin d’optimiser l’investissement de l’enfant, il délivre des conseils pour réduire la charge cognitive et renforcer la confiance en soi.
Certains enfants avec des troubles du langage présentent aussi des difficultés attentionnelles, comme dans le cas du TDAH. Ceux-ci peuvent avoir du mal à suivre des consignes, organiser leur pensée et exprimer clairement leurs idées. L’orthophonie leur permet alors de mieux structurer leur langage, améliorer leur compréhension et gérer leur impulsivité verbale.
Questions les plus posées sur les troubles du langage chez l’enfant
- À quel âge un enfant doit-il dire ses premiers mots ? Il n’y a pas d’âge strict pour les premiers mots, car chaque enfant évolue à son rythme. En général, ils apparaissent entre 12 et 16 mois, avec une progression du vocabulaire entre 2 et 3 ans, puis des phrases plus complètes entre 3 et 4 ans. Vers 4-5 ans, le langage devient plus structuré et complexe. Si à 2 ans, un enfant ne dit aucun mot ou semble avoir peu d’interactions verbales, il peut être utile d’en parler à un professionnel.
- Quelle est la différence entre un retard de langage et un trouble du langage ? Un retard de langage signifie que l’enfant parle moins que les autres de son âge, mais progresse avec le temps et la stimulation. Il peut être rattrapé naturellement ou avec un léger accompagnement. En revanche, un trouble du langage est plus profond et durable. Dans ce cas, l’enfant rencontre des difficultés persistantes à structurer ses phrases, comprendre les consignes ou prononcer certains sons. Dans ce cas, une prise en charge orthophonique est nécessaire.
- Comment savoir si mon enfant a besoin d’un orthophoniste ? Si votre enfant a des difficultés à prononcer des mots, à structurer ses phrases, à comprendre et exécuter des consignes, ou si son langage semble nettement en retard par rapport aux enfants de son âge, il est recommandé de consulter un orthophoniste. De même, si des difficultés scolaires persistantes apparaissent en lecture, écriture ou expression orale, un bilan orthophonique peut être utile.
- À quel âge peut-on consulter un orthophoniste ? On envisage généralement une première consultation vers 3 ans si l’enfant montre des signes de retard de langage important. Cependant, la prise en charge débute souvent vers 5 ans, âge auquel l’enfant peut mieux coopérer et se concentrer lors des séances. Dans certains cas (troubles sévères, suspicion de trouble neurodéveloppemental comme la dysphasie ou le TSA), une évaluation orthophonique peut être réalisée encore plus tôt.
- Quels exercices faire à la maison pour aider un enfant à mieux parler ? Les orthophonistes proposent des exercices personnalisés que les parents peuvent reproduire à la maison. En complément, il est recommandé de stimuler le langage au quotidien à travers des jeux et des échanges interactifs. La lecture à voix haute et l’écoute audio enrichissent le vocabulaire et la compréhension, les jeux de devinettes et jeux de société encouragent l’expression orale, et les quiz ou chansons rythmées aident à la structuration du langage. L’important est de parler régulièrement avec l’enfant, reformuler correctement ses phrases et valoriser ses efforts sans le brusquer.
Détecter et prendre en charge un trouble du langage dès les premiers signes permet à l’enfant d’évoluer plus sereinement dans ses apprentissages et son développement. Une consultation orthophonique précoce peut prévenir des difficultés plus importantes et favoriser une meilleure intégration scolaire et sociale. Si vous avez le moindre doute, n’hésitez pas à consulter un professionnel pour accompagner votre enfant vers une communication plus fluide et épanouie.
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