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Tout savoir sur la méthode syllabique pour apprendre à lire

méthode syllabique pour apprendre à lire

Lorsqu’on évoque les méthodes pour apprendre à lire, on pense immédiatement au conflit entre deux approches : la méthode syllabique et la méthode globale. Pourtant, ce débat remonte aux années 60 et, depuis, l’Éducation nationale a statué en faveur de la méthode syllabique. Car elle permet au plus grand nombre d’apprendre à lire. Cette performance n’exclut pas l’intérêt des autres méthodes qui peuvent être convoquées en complément ou en différenciation pédagogique. On considère que la méthode syllabique sert de base avec ses exercices systématiques, réguliers et répétés. Mais aussi que de multiples activités conduisent l’enfant vers la lecture autonome, notamment celles qui mettent en valeur le sens du texte ou qui enrichissent le lexique et champ culturel de l’enfant.

En quoi consiste la méthode syllabique ? Comment l’apprentissage de la lecture se déroule-t-il en classe (et à la maison) ? Quelles sont les activités et approches complémentaires qui favorisent l’apprentissage de la lecture ?

Apprentissage de la lecture : méthode globale ou syllabique ? 

Revenons tout d’abord sur les principes de base de la méthode syllabique.

L’apprentissage de la correspondance grapho-phonétique

L’entrée dans l’écrit débute avec les premiers livres pour bébé, mais c’est la maternelle qui marque un cap décisif. Les enfants y apprennent à reconnaître les lettres de leur prénom puis à savoir l’écrire. Ils repèrent les indices visuels pour identifier de nouveaux mots (longueur, sens de lecture, comparaison lettre par lettre). Mais ils travaillent surtout la reconnaissance autour des phonèmes : le son des lettres mais aussi des syllabes. Les élèves scandent le découpage des mots en frappant dans leurs mains, par exemple. Ainsi, ils identifient les deux puis trois syllabes des mots comme gâ/teau ou ma/te/lot. Ces exercices les préparent à découper correctement les mots en vue de les déchiffrer.

En effet, on parle de déchiffrage puisqu’on considère que notre langue repose sur un code syllabique. L’alphabet étant l’outil pour élaborer ce code. C’est pourquoi, parallèlement aux activités d’écoute et d’observation de l’écrit sur divers supports (tableau, polycopié, mais aussi affiches dans la rue), les enfants apprennent aussi l’alphabet par coeur.

L’apprentissage de la lecture au CP et CE1

Une fois ces compétences acquises, l’enfant accède au CP et à l’étude systématique du code. La plupart des méthodes de lecture de Cours Préparatoire abordent les phonèmes dans un ordre précis. Cet ordre correspond à la difficulté de l’encodage et à des paliers d’intégration. Ceux-ci permettent de progresser en suivant une certaine logique. Cet apprentissage se poursuit en CE1 avec une reprise de tous les graphèmes et l’introduction de sons plus rares.

Concrètement une progression en phonologie démarre avec les sons [a], [b], [p] pour s’achever avec [eil], [ail], [ouil]. Puis elle aborde les valeurs des lettres g, c, s etc. L’enfant doit identifier de plus en plus rapidement les différentes combinaisons. Par exemple, la lettre c fait [k] devant a, o et u, mais fait [s] devant e, i, y. C’est pourquoi on parle aussi de méthode combinatoire à propos de la méthode syllabique.

Les apports de la méthode globale dans la méthode syllabique

Cependant, afin de proposer aux élèves de lire rapidement de courtes phrases, certains mots sont mémorisés indépendamment du déchiffrage et de la logique de progression. Ce “trésor de mots” s’apparente donc à une approche globale. Pour mémoire, la méthode globale a été conçue par Ovide Decroly dans les années 1900. Pédagogue prônant la pédagogie active au sein d’une école “par la vie, pour la vie”, Decroly s’inspire de ses observations pour développer une méthode qui implique l’enfant. À partir de mots d’usage fréquent, l’enfant construit sa connaissance du code.

apprendre à lire avec la méthode globale ou la méthode syllabique

La méthode globale, dite “analytique”, part du mot qui fait sens dans le quotidien de l’enfant pour l’étudier, l’analyser et le décomposer en syllabes, graphèmes, lettres. C’est le chemin inverse de la méthode syllabique, dite “synthétique “, qui part de l’unité graphème dépourvue de sens pour construire des unités sémantiques. Avec la méthode globale et sa liste de mots courants qui reprend l’ensemble des correspondances grapho-phonétiques, l’enfant fabrique de nouveaux mots.

©Canva Pro

En appui de la méthode syllabique, l’approche globale fournit aux élèves une base de mots fréquents. La plupart de ces mots proviennent de la grammaire de phrase : les pronoms personnels sujets (je, tu, il/elle/on, nous, vous, ils/elles), les mots de liaisons (mais, pendant…), les déterminants (un/une, le/la/les, mon/ton/son, mes/tes/ses) les adverbes et prépositions (comme, avec, dans…), le verbe “est” et la structure grammaticale “c’est” etc. On attend de l’enfant qu’il les connaisse par coeur pour en automatiser la lecture et l’écriture. Ils font partie des mots outils que les élèves manipulent quotidiennement.

Au-delà du CP, ces mots font l’objet d’un apprentissage systématique tout le long de l’école élémentaire et sont régulièrement évalués durant les dictées. On attend des élèves qu’ils sachent les orthographier et les utiliser à bon escient dans leurs productions écrites. Ils servent d’outils pour concevoir un texte avec ses marqueurs de temps, ses mots de transition, son argumentation.

Quelles méthodes de lecture au-delà du CE1 ?

L’apprentissage de la lecture ne se limite pas au CP et au CE1. Certains enfants savent déjà lire en MS, d’autres ne deviendront de bons lecteurs qu’à la toute fin du primaire. Mais pour tous le déchiffrage est un préalable, un passage obligé pour accéder au sens.

Apprend-on toujours à lire après le CE1 ?

On considère qu’à l’issue du CE1 les élèves maîtrisent la combinatoire. Ils sont capables de déchiffrer un texte adapté à leur niveau d’âge, avec une fluence moyenne de 70 mots par minute. Ils décodent de manière automatisée les combinaisons de lettres les plus complexes (ail, eil, euil, tion, oeu, gn, etc.). Mais surtout les élèves accèdent au sens du texte et sont capables d’inférer en relevant des indices. Ils identifient les personnages, les éléments de l’intrigue qu’ils reformulent en restitution écrite ou orale.

Les années de CE2, CM1 et CM2 permettent d’améliorer la fluence et la compréhension de textes de plus en plus complexes, du point de vue de leur structure et de leur lexique. Les enseignants ont recours à divers outils adaptés aux spécificités de leurs élèves et à leurs besoins pédagogiques. Certains optent pour des ateliers de lecture à mener en groupe ou des fiches à réaliser en autonomie. Les élèves abordent aussi bien des textes de théâtre, des contes que des romans et de la poésie.

©Canva Pro

développer ses compétences de lecteur à l'école primaire

Par ailleurs, les compétences de lecture s’appuient aussi sur un vocabulaire de plus en plus riche. Les sorties culturelles, la pratique artistique et sportive, l’apprentissage des sciences et de l’histoire-géographie, les activités de loisir… Toutes ces connaissances et expériences participent à la culture générale des enfants. Elle leur permet de déployer leur réflexion et d’aborder des ouvrages littéraires de plus en plus complexes.

Le nouveau challenge de l’Éducation nationale : augmenter la fluidité de la lecture

Parallèlement à l’apprentissage du code, les élèves lisent régulièrement des graphèmes pour développer leur fluence dès le CP. Ce terme fait désormais partie des objectifs fixés par les programmes. S’appuyant sur des études en linguistique et didactique, l’Éducation nationale a introduit cette compétence pour lutter contre la baisse des compétences de lecture constatée à l’entrée au collège.

D’après un article Les Échos du 10/10/20, « pour la première fois, un test a été réalisé en septembre [2020] sur des échantillons représentatifs d’environ 29.000 élèves. Seuls 53,4 % des élèves atteignent le score moyen de « fluence » qui, en fin de CM2, doit conduire les élèves à lire 120 mots et plus par minute. Ils sont même 15,4 % à ne pas atteindre le score attendu en fin de CE2 (90 mots lus en une minute) et 31,1 % présentent des fragilités (entre 90 mots et 120 mots par minute). » (A l’entrée en sixième, près d’un élève sur deux n’a pas le niveau de fluidité requis en lecture, article de Marie-Christine Corbier).

Ce constat avait d’ailleurs poussé le président Emmanuel Macron à décréter la lecture « grande cause nationale ». De l’été 2021 à l’été 2022 des initiatives devaient permettre de faire découvrir « la beauté littéraire » aux enfants. Ce goût pour la lecture embrasse désormais un prisme large qui comprend les livres papiers, les livres numériques et audio, les histoires audio et podcasts littéraires pour enfants et adolescents.

Quels sont les enjeux de la lecture à l’école ?

On le voit donc, le principal enjeu de l’école est d’amener un maximum d’élèves à lire de manière fluide et rapide tous types de textes. On assiste actuellement au retour d’un apprentissage plus systématique du décodage/encodage syllabique qui évacue la question de la compréhension. De fait, il est établi que l’enfant ne peut mener de front les deux opérations cognitives qui consistent à déchiffrer et comprendre. La compréhension des textes n’est pour autant pas délaissée, mais elle est abordée dans des temps distincts. D’un côté l’enseignant fait travailler les élèves sur l’acquisition du code et l’amélioration du déchiffrage. De l’autre, il incite les élèves à interroger les textes lors de débats et échanges.

Traditionnellement l’école primaire porte une attention particulière à la compréhension littérale des textes. Ce qui explique pourquoi il y a autant de “questionnaires” de lecture qui réclament des élèves de prélever des indices dans le texte. Cependant, cette approche concerne tous les types de textes : textes littéraires mais aussi documentaires, notices, consignes d’exercices etc.

album jeunesse lecture implicite gilles bachelet mon chat le plus bête du monde

Or, la littérature réclame aussi un apprentissage spécifique pour en apprécier ses qualités. La lecture d’albums en maternelle aborde déjà l’implicite, les inférences, les représentations et les oppositions textes/images. Mais en début d’élémentaire, cet axe est relativement délaissé au profit d’une approche plus “technique”. Et si l’on demande par la suite aux élèves d’interpréter les textes lus, il est rare qu’il leur soit proposé d’évaluer leur lecture. C’est pourtant ce que préconisent les didacticiens de la littérature en conseillant la tenue de carnets de lecture conjointe à la pratique de débats littéraires au sein de communautés de lecteurs.

Les étapes de la méthode syllabique

La méthode syllabique apporte tous les outils nécessaires au déchiffrage du texte. Elle aborde la phonologie de manière progressive en respectant des étapes :

  • Initiation en maternelle fondée sur la reconnaissance auditive des unités phonétiques (phonèmes), à travers notamment des comptines. La correspondance entre “j’entends/je vois/j’écris” qui se sera largement réinvestie au CP ;
  • Étude systématique des sons simples : une seule lettre prononcée, toujours de la même manière (exemple [a]) ;
  • Étude systématique des sons complexes formés par deux ou trois lettres (ou, au/eau, oi, an, on, in, eil, ail, ouil). Les sons sont étudiés seuls (graphèmes) et dans des mots par découpage syllabique. Les élèves intègrent l’unité syllabique comme signifiant visuel (écrit) et auditif (prononciation à l’oral). Ils comprennent que la syllabe comporte plusieurs sons encodés et combinés par les lettres. Par exemple dans “ba/teau”, la première syllabe comporte le son [b] et le son [a] qui se combinent pour faire [ba]
  • À tous les niveaux de l’école élémentaire : entraînement à la fluence. Il s’agit de la capacité à déchiffrer rapidement et sans heurt des graphèmes de plus en plus longs et complexes. En fin de CE1, les élèves doivent pouvoir déchiffrer sans difficulté des mots peu fréquents ;
  • Automatisation du déchiffrage qui se mue en lecture automatique par reconnaissance visuelle. On parle de compétences visuo- attentionnelles. Cette capacité se mesure par l’empan visuel. “En effet, l’étape du traitement qui consiste à apparier des traits visuels avec les identités des lettres constituantes du mot est une étape charnière entre le traitement des informations visuelles et le traitement des informations linguistiques.” (“Processus visuo-attentionnels et lecture : une synthèse” , dans L’année psychologique, 2016).

À noter qu’on estime l’empan visuel à environ 3-4 lettres à gauche et 7-8 lettres à droite de la fixation. En consultation orthophonique, les élèves dyslexiques apprennent à développer leurs capacités visuo-attentionnelles pour améliorer leur lecture. C’est aussi ce que travail la pratique régulière de la fluence au CP avec des graphèmes variés. Il s’agira par exemple de lire le plus vite possible la séquence par/pour/por/pru/pir/poru/pra/pur…

Quels sont les avantages de la méthode syllabique ? 

La méthode syllabique présente de nombreux avantages :

  • Logique : elle correspond à de nombreuses aptitudes des enfants dès leur plus jeune âge : encastrer, combiner, associer etc.
  • Systématique : elle s’emploie dans toutes les situations de lecture et même un lecteur expert y revient face à un mot inconnu.
  • Pré-requis limités : en dehors de la connaissance de l’alphabet, cette approche ne nécessite pas de connaître les mots au préalable. L’enfant peut même lire des graphèmes qui n’ont pas de sens. Il travaille la technique dont il se libère ensuite pour mieux se focaliser sur le sens de ce qu’il lit.
  • Accessible : la méthode syllabique est simple et compréhensible par l’ensemble de la communauté éducative. À la maison, les objectifs pédagogiques apparaissent clairement et l’adulte peut aider facilement l’enfant à s’entraîner.
  • Efficacité validée par la communauté scientifique : plusieurs études montrent que les enfants acquièrent plus rapidement des compétences de lecteur avec la méthode syllabique plutôt qu’avec la méthode globale.

Cependant, la méthode globale présente aussi ses avantages et la méthode syllabique lui emprunte l’apprentissage global de certains mots d’usage courant.

Les méthodes Boscher et Montessori pour apprendre à lire 

Vous avez sans doute déjà aperçu sur les étals des libraires les publications estampillées Boscher et Montessori. Que recouvrent-elles exactement ?

Qu’est que la méthode Boscher ?

La méthode Boscher date de 1906 et a permis à de nombreux enfants sur plusieurs générations d’apprendre à lire à travers la méthode syllabique. Les parents et grands-parents qui ont eux-mêmes fréquenté ce manuel ont plaisir à le transmettre à leurs propres enfants et petits-enfants. Ainsi, la maison d’édition Belin réédite chaque année 50 000 exemplaires de cette méthode aux illustrations délicatement surannées. Par ailleurs, cette méthode inclut aussi l’apprentissage de l’écriture et du calcul. À partir d’une grande image qui met en scène des mots pour étudier un son, l’enfant oralise ces mots, les lit puis les écrit. Cette entrée permet donc aussi de travailler immédiatement l’orthographe.

La méthode Boscher porte le nom de son créateur Mathurin Boscher, qui enseignait à des enfants d’âges variés au sein d’une même classe. Il a cherché à concevoir un outil complet et simple d’utilisation pouvant convenir à différents âges. Aujourd’hui cette méthode s’adresse plutôt à la sphère familiale. Même si des enseignants l’utilisent aussi pour remédier aux difficultés de lecture de leurs élèves.

méthode de lecture écriture calcul boscher belin

Qu’est-ce que la méthode de lecture Montessori ?

La méthode Montessori ne s’intéresse pas seulement à la lecture. Plus qu’une méthode, c’est une pédagogie basée sur la participation des enfants à leurs propres apprentissages. Elle fait appel à l’autonomie, la créativité et la confiance en soi. Maria Montessori était avant tout une pédiatre qui a travaillé auprès d’enfants défavorisés dans différents pays du monde, dont l’Inde. Tout comme d’autres pédagogues de son époque, Decroly, Freinet etc., elle avait pour ambition de faire accéder un maximum d’enfants aux apprentissages.

méthode de lecture montessori coffret de matériel nathan

Concernant l’apprentissage de la lecture, la méthode phonologique multisensorielle Montessori sollicite l’ouïe, le toucher et la vue. Il ne s’agit donc pas d’une méthode syllabique. Tout d’abord, l’enfant explore la phonologie de la langue. Il sait repérer le début, la fin puis le milieu d’un mot. Il entend les rimes et sait découper les mots en les rythmant. Une fois la conscience phonologique acquise, l’apprentissage de la lecture démarre avec les lettres rugueuses. L’adulte passe son doigt sur la lettre dans le sens du tracé et en prononce le son. L’enfant répète cette opération jusqu’à ce qu’elle soit intégrée et passe à une autre lettre. Puis grâce à un matériel adapté, l’alphabet mobile, l’enfant encode ce qu’il entend en dictée. Il peut aussi explorer librement les possibilités de la combinatoire. Enfin, il atteint l’étape du décodage systématique en associant une image à un mot, avec des paliers de difficulté. À noter que certains éditeurs proposent aussi des méthodes mixtes syllabique et montessorienne (Hatier, Larousse…).

Il existe encore d’autres méthodes d’apprentissage de la lecture : la méthode mixte, naturelle (Freinet), gestuelle (Borel-Maisonny), interactive (Chauveau)… Elles apportent des outils de remédiation intéressants pour aider les enfants en difficulté.

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