Enseignante, blogueuse éducation et passionnée de littérature jeunesse, Lauriane a pour leitmotiv la pédagogie active, notamment par le théâtre, et la lecture pour tous. Retrouver tous ses articles
Impolis et égoïstes, les enfants seraient de piètres camarades, de surcroit ingrats avec leurs parents. Vraiment ? Rien n’est moins sûr si tant est qu’on regarde de plus près les travers des adultes eux-mêmes. Or, tout le monde s’accorde à dire que pour vivre en société un certain degré de gratitude et de partage envers les autres est indispensable. Est-ce que ça s’apprend et est-ce applicable en toute circonstance et à tout âge ?
Transmettre la joie de vivre à ses enfants
Que désigne exactement la gratitude ? Elle se définit comme un « sentiment de reconnaissance et d’affection envers quelqu’un » (Cnrtl). Il s’agit donc de la posture de celui qui reçoit et remercie sincèrement en étant touché du service ou de l’attention dont il a été l’objet. De fait, la marque minimale de gratitude s’exprime à travers un petit mot : « merci ». Ces cinq lettres font partie des formules de politesse mobilisables en toutes circonstances et face aux proches comme aux étrangers. Il ne suffit pas à dire toute la gratitude, mais amorce souvent un échange verbal ou des gestes et sourires de reconnaissance.
Si la vie en société réclame la politesse, la gratitude pour sa part franchit un seuil supplémentaire. Elle est une expression et un partage d’émotions positives qui contribue à enchanter le quotidien. Elle modifie la manière de percevoir le monde, invite à en relever ce qui est beau et touchant. De fait, pour qu’un enfant remercie spontanément ou apprécie ce qu’on lui offre, il doit d’abord apprendre à ressentir la joie. Bien qu’il s’agisse d’une émotion positive, celle-ci n’est souvent tolérée que dans des contextes bien précis : une victoire sportive, une fête d’anniversaire, etc. Qui n’a pas entendu l’expression « calme ta joie » face à une réaction heureuse ? La joie serait bruyante, démonstrative et donc inconvenante en société…
Quelle erreur bien sûr de cantonner la joie à ses seules explosions ! Joie et gratitude disent le plaisir de recevoir, de donner, de remercier l’autre et de recueillir sa réaction ravie, émue. La joie n’est pas seulement l’invitée des fêtes, elle se loge dans les petites attentions de tous les jours. Faire le bien d’autrui donne du sens à un geste ou une parole. Exprimer sa gratitude c’est finalement reconnaitre la valeur d’une personne et privilégier la transmission émotionnelle plutôt que les gratifications matérielles. Les fêtes offrent un terrain fertile à la joie avec ses lumières, ses retrouvailles, ses traditions culinaires et ses moments de partage qui nourrissent la mémoire affective de l’enfant. Celui-ci expérimente la gratitude en tant que mouvement intérieur et non obligation sociale.

Enseigner à ses enfants les règles de la vie en société
Comment apprendre à mon enfant à être reconnaissant ? C’est une question fréquemment posée par les parents qui s’interrogent sur ce volet de l’éducation bienveillante. Et certains parents ressentent parfois de la culpabilité face au manque de gratitude de leur enfant. Comment y remédier et faire en sorte que l’enfant accepte et intègre les règles du savoir-vivre ?
La gratitude s’appuie aussi sur des codes sociaux que l’enfant acquiert au fil des ans. Attendre son tour, dire bonjour, écouter les autres, remercier, autocensurer les gros mots … Les fêtes, avec leurs rassemblements familiaux parfois mouvementés, sont une occasion parfaite pour rappeler ces règles. Toutefois les exigences varient en fonction de l’âge et demandent un apprentissage sur le long terme. Par exemple le refus de partager traduit souvent une angoisse plus que de l’égoïsme. L’enfant protège son espace et les objets qu’il a investis affectivement.
Partager avec un camarade peut donc s’avérer difficile. Alors, que faire si l’enfant ne veut pas prêter ses jouets ? Inutile de le forcer ou de le brusquer, il risquerait de le vivre comme une injustice. Mieux vaut trouver un compromis, comme prêter un autre jouet ou privilégier un jeu collectif. De même, un enfant de 6 ans qui oublie de dire merci est certainement absorbé par son jeu et non impoli. L’essentiel est d’accompagner sans humilier, en donnant l’exemple et en prévenant à l’avance : « Quand tu auras ouvert ton cadeau, pense à remercier ta grand-mère. » Discutez de ses éventuels problèmes de timidité et insistez sur la portée du mot « merci », expression de la gratitude et de la reconnaissance d’un geste.
Attention cependant, le respect et la gratitude ne s’imposent pas : ils se pratiquent, continuellement, dans un climat de confiance. Les fêtes ne sont pas un examen, mais un moment de détente et de plaisir partagé. Ainsi, la chaleur des relations familiales crée le terrain propice à l’expression de la gratitude. Aux parents d’aider leurs enfants à trouver les mots pour la formuler !

Apprendre le partage à son enfant
Le partage n’est pas inné. Il suppose de comprendre que l’autre existe autant que soi, avec ses envies et ses besoins. C’est un apprentissage progressif, souvent conflictuel, mais fondamental pour entrer sereinement dans la vie sociale. On considère qu’arrivé en GS, l’enfant doit pouvoir respecter un certain nombre de règles pour vivre en collectivité. Le partage en fait partie, tant dans les locaux, le matériel que dans ses relations sociales et amicales. Comment expliquer le partage à un enfant de 5 ans ? Et à un plus jeune ou plus âgé ?
Pendant les fêtes, le partage prend des formes variées : distribuer des cadeaux, découper la galette, partager son temps de jeu avec un cousin plus jeune, aider à mettre la table.
Pour guider un enfant vers la générosité, voici quelques conseils :
- Commencer avec des objectifs raisonnables et progresser en respectant les capacités psycho-sociales de votre enfant : partager un morceau de mandarine, un coloriage, un temps de jeu, avant de prêter son livre préféré ou son robot télécommandé.
- Éviter l’argument de la gentillesse : mieux vaut expliquer ce que le partage apporte aux autres.
- Complimenter l’effort : « Tu lui as prêté ton déguisement d’astronaute, c’était difficile mais tu l’as fait ! ». Ce renforcement positif encourage les enfants à être coopératifs et valorise la capacité à partager.
- Proposer des activités qui impliquent une coopération : cuisiner ensemble, préparer un cadeau commun fait maison (DIY pour les grands-parents, cadeaux pour la fête des pères et mères, cadeau de fin d’année pour le maître ou la maîtresse).
Existe-t-il des activités en lien avec les traditions de Noël pour apprendre la générosité ? Il serait étrange d’attendre Noël pour se poser cette question. La générosité ne se cantonne pas qu’à ce bref moment de fête et mérite qu’on s’y attelle toute l’année.

Noël solidaire : partager et recevoir en créant du lien
Cependant cette période est traditionnellement riche en bonnes actions et invitent les enfants à réfléchir à leur comportement et aux possibilités de faire le bien autour d’eux. De nombreuses structures, associations comme entreprises, mènent des actions caritatives dans le sens d’un Noël solidaire : dons de jouets, mais aussi produits de première nécessité, collectes de nourriture et de produits d’hygiène, etc. auxquels l’enfant peut participer. On peut aussi mettre en oeuvre chez soi le principe du calendrier de Noël inversé. Au lieu de recevoir, l’enfant offre chaque jour un objet qu’il place dans une boite. Au bout des 24 jours, un lot complet est prêt à être donné à une association qui le remettra à une personne démunie.
Un Noël solidaire s’illustre aussi dans les cadeaux qu’on choisit pour ses enfants ou que les enfants offrent à leurs parents. Acheter à une entreprise locale impliquée dans la réinsertion professionnelle contribue à renforcer la cohésion sociale. Et d’une manière plus large, privilégier les artisans de proximité procède de la même démarche. La gratitude peut aussi s’exprimer dans un comportement économique. Même si cette notion est forcément très floue pour l’enfant, il comprend néanmoins qu’acheter une bougie ou une couronne de Noël à un commerçant du coin permet un échange humain inexistant sur les plateformes en ligne.
Par exemple, lorsque l’enfant choisit un livre chez le libraire du quartier, il conjugue plaisir de côtoyer les livres et lien social avec le commerçant. La gratitude est alors réciproque ! Et c’est valable pour tous les petits commerces et stands d’artisans et créateurs sur les marchés, foires et salons. Si vous avez peur que votre enfant soit trop gâté, mettez-vous d’accord avec tous les personnages susceptibles de faire des cadeaux. Établissez une liste stricte et privilégiez les cadeaux non matériels pour investir dans l’humain : un après-midi à la piscine, une sortie au musée ou au théâtre, etc.

Fêtes et savoir-vivre en famille
Les fêtes ne sont pas seulement un moment d’abondance, mais aussi un espace de tension, d’attente et de fatigue. Le savoir-vivre en famille s’apprend justement quand tout le monde doit composer avec l’autre.
C’est l’occasion d’apprendre à un enfant à :
- Respecter le rythme familial : attendre avant d’ouvrir un cadeau, patienter à table ;
- Exprimer son enthousiasme en prenant en compte son entourage. Par exemple, expliquez à votre enfant que les personnes présentant des troubles auditifs peuvent être incommodées par les environnements bruyants ;
- Faire preuve de délicatesse face à un cadeau qui ne lui plaît pas vraiment ;
- Participer aux moments communs sans monopoliser l’attention et en écoutant tout le monde.
Là encore, l’objectif n’est pas de viser la perfection. Les interactions sociales sont faites d’imprévus et de déconvenues aussi, mais vous pouvez donner des repères qui serviront toute la vie.
Les fêtes enseignent aux enfants que la convivialité repose sur l’attention mutuelle. Elles montrent que derrière chaque cadeau, chaque repas ou chaque histoire racontée, il y a du temps, de l’énergie, une intention. C’est en nommant ces efforts – « Mamie a cuisiné toute la journée », « Papa a passé du temps à choisir ce cadeau » – que la gratitude devient concrète et se ressent avec sincérité.

10 idées d’activités en famille à faire pendant les fêtes
Le climat des fêtes s’inscrit dans un temps de vacances d’hiver bien au chaud chez soi ou emmitouflés en balade. Une occasion de se rapprocher les uns des autres, de partager de doux moments avec ses enfants et de cultiver la gratitude et le partage.
Voici 10 activités simples et chaleureuses à faire pendant les fêtes… et toute l’année !
- Le pot de gratitude. Chaque soir, les membres de la famille déposent un petit papier : « Aujourd’hui, j’ai aimé… » « Je remercie… Et le 31 décembre ou à la fin des vacances, on ouvre tout le pot ! Idéal pour ritualiser la reconnaissance au quotidien.
- Le compliment partagé. On se met en cercle. Chacun dit une gentille phrase à la personne à sa droite. Exemples : « J’ai aimé quand tu m’as aidé à ranger. » « Tu m’as fait rire quand… » Super exercice pour renforcer la cohésion familiale.
- Le tableau des mercis. Visible dans la maison, il rappelle chaque jour les gestes qui comptent. Les enfants décorent l’affiche avec des petits mots et des autocollants pour dire « merci pour » le repas, les histoires, les jeux, les chansons…
- Préparer un cadeau « fait maison » pour quelqu’un. Dessins, petits sablés, porte-clés, pompon … Le don devient une action tangible. Ou encore cuisiner pour offrir (des biscuits à donner au voisin, un gâteau pour l’école ou la garderie, etc.). L’enfant découvre que le partage rend heureux… des deux côtés.
- Lire un livre sur la gratitude ou la générosité. L’univers de l’autrice-illustratrice Anne Brouillard évoque souvent la gratitude (par exemple, dans Pikkeli Mimou, Killiok cuisine un gâteau d’anniversaire pour son ami et brave la forêt hivernale pour le lui apporter). Delphine Bournay aborde aussi très souvent cette thématique (Le concours de force), notamment à travers ses personnages Grignotin et Mentalo. On peut citer encore C’est MON arbre d’Olivier Tallec, ainsi que le classique L’arbre généreux de Shel Silverstein. Vous pouvez aussi lire un conte ou une histoire de Noël qui mentionnent souvent la gratitude comme une valeur fondamentale.
- Le jeu du « service secret ». Chaque jour, un membre de la famille doit accomplir un petit geste gentil anonyme : ranger un jouet, mettre la table, laisser un dessin. On découvre ensuite ensemble « qui a fait quoi ? ».
- Trier pour donner. Laissez l’enfant choisir lui-même ce qu’il offre : un jouet inutilisé, un livre pour bébé, un vêtement devenu trop petit puis le déposer ensemble dans une structure locale (croix rouge, association, boîte à livres).
- Fabriquer une carte de remerciements, pour la maîtresse, la nounou, un ami, la famille. Apprendre à dire merci par écrit développe le sens de la reconnaissance.
- Ritualiser un temps d’échange où chacun énonce un temps fort de la journée : ce qui l’a rendu heureux, ce qui l’a contrarié, ce dont il a besoin. Ce sera une belle façon d’enseigner le respect des émotions. Dans l’album La famille souris se couche une scène représente toutes les souris rassemblées en cercle pour raconter leur journée au coin du feu. Un doux moment apprécié des jeunes lecteurs et à reproduire chez soi pour en expérimenter l’esprit dans la vie concrète !
- Faire une playlist des moments heureux. Chaque membre choisit une chanson qui lui rappelle un bon souvenir ou une personne chère. On écoute ensemble et on raconte pourquoi.
Apprendre la gratitude et le partage à son enfant nécessite de la patience et un accompagnement bienveillant. Rien ne sert d’exiger, il faut plutôt créer un contexte motivant qui justifie de donner et de remercier. En repérant le positif et le beau dans son quotidien, l’enfant construit son équilibre mental. Il éprouve la joie de recevoir et se montre reconnaissant envers ses parents, ses amis, sa famille. Dans le cadre d’une initiation religieuse ou laïque, il accède à une forme de spiritualité qui contribue à le connecter avec son environnement naturel et humain.
Si vous avez des idées d’activités à mener pendant les fêtes pour transmettre la joie, le sens du partage et la gratitude aux enfants, rendez-vous sur nos réseaux sociaux Facebook et Instagram !



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